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CirqueUn corbeau, deux chevaux, trois perruches et huit saltimbanques ensorcelleront Vidy

Saltimbanques et animaux (dont les perruches callopsites «Zou», «Farouche» et «Giovanni») cohabitent joyeusement dans «Bestias», spectacle farci de poésie imaginé par la compagnie franco-catalane Baro d'Evel.

À peine s'est-on faufilé sous le chapiteau enchanté de Baro d'evel que le sortilège circassien nous enveloppe. Aux murs, des dessins évoquent, par bribes, les images du spectacle. Un cheval surgit en ombre chinoise, derrière un panneau circulaire. On prend place dans les gradins. Envoûté, déjà. La compagnie franco-catalane cultive l'art de l'ensorcellement dans ses spectacles confinant à la fantasmagorie. Dans «Bestias», huit saltimbanques partagent la piste avec un bestiaire aussi agile que malicieux. Un moment suspendu, hors du monde, hors du temps, où l'homme et l'animal cohabitent dans une rare harmonie. Leur conte – ou est-ce un rêve éveillé? – ouvre la saison du Théâtre de Vidy, dès ce mardi et jusqu'à dimanche.

Sur la piste, cette tribu utopique joue, danse, se chatouille et se chamaille, répond aux réactions de l'autre dans une exploration perpétuelle. Complicité de l'homme et de l'animal. À l'image de «Hate», de Lætitia Dosch, créé à Vidy en juin dernier avec un cheval comme partenaire, «Bestias» magnifie la relation à l'animal comme source de célébration de la vie ensemble, comme rempart poétique au chaos. Le dressage et la contrainte sont bannis de leur vocabulaire scénique. «Nous travaillons à partir de l'observation. Leur présence, leur nonchalance, cette idée qu'ils ne veulent pas en faire plus alors que nous cherchons toujours à aller plus loin, c'est d'une simplicité bluffante, confie Blaï Mateu Trias, cofondateur de Baro d'evel. Le cheval qui traverse la piste nous révèle qu'il se passe quelque chose, ici et maintenant, qui ne peut se jouer que sur le moment. L'animal nous met en connexion directe avec cela. C'est un rituel païen.»

Cérémonie chamanique

Moment intense du spectacle, la danse des acrobates recouverts de bottes de paille, sorciers animistes, nous emmène dans une cérémonie chamanique. Un exutoire. Entrelaçant les arts du cirque, la danse et la musique, les saltimbanques oscillent entre partitions virtuoses et parenthèses enchantées sublimant la poésie et l'onirisme. On rit, comme des enfants, devant le numéro de «Gus», espiègle corbeau pie qui s'amuse à chiper papiers et stylo sur un pupitre, l'air de ne pas y toucher – quelle bête de scène! On s'émerveille aussi devant la farandole de Noëmie Bouissou, contorsionniste aux atours de diva surréaliste, et de ses trois perruches calopsittes «Zou», «Farouche» et «Giovanni». Tour à tour, le trio à plume s'envole, se pose sur les bras et la tête de l'acrobate ou virevolte au-dessus de la piste. Ode à la liberté. «Les imprévus et les imperfections font partie intégrante du spectacle, souligne Blaï Mateu Trias. Aucune représentation ne se ressemble et on essaie de donner une valeur ajoutée à cela. Ce qui nous intéresse, c'est d'être vivants sur scène.»

Dans cette communion scénique, les artistes entremêlent les langues. L'un parle catalan, l'autre français, un autre encore anglais. Mais nul besoin d'être polyglotte pour se laisser entraîner dans leur fantaisie. Cet entrelacement des idiomes, sans sous-titres, exalte le sens philosophique du conte. Comment tisser des relations autrement que par la parole? Est-ce que le langage est réellement un vecteur de compréhension? «Parfois, tu comprends mieux une personne qui s'exprime dans une langue étrangère que quelqu'un qui parle dans ta langue, observe l'artiste. L'idée est d'explorer les différentes manières de faire un pas vers l'autre.» L'homme et l'animal. L'artiste et le public. Les images de Baro d'evel ont trouvé la formule.