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Scène«Mes pièces se révèlent dans leur rencontre avec le public»

La pièce «Je suis un pays», de Vincent Macaigne, intègre un second spectacle «Voilà ce que jamais je ne te dirai».

Jeudi après-midi, coup de fil du Théâtre de Vidy. Les détenteurs d'un billet pour Voilà ce que jamais je ne te dirai, spectacle enchâssé dans la nouvelle création de Vincent Macaigne, Je suis un pays, sont conviés à 21 h 30, une heure plus tard que l'horaire prévu. Dans le même temps, les journalistes et critiques sont enjoints à différer leur venue de quelques jours, le temps que l'œuvre «mûrisse».

En mars déjà, la précédente création de Macaigne, En manque, avait évolué au fil des représentations – en raison du peu de répétitions. A la même période, la star Romeo Castellucci dévoilait, au bord du lac, un De la démocratie en Amérique radicalement différent du spectacle présenté peu avant à sa création à Angers.

Les férus de théâtre le savent, les spectacles sont parfois encore «frais» le premier soir. De là à transformer le public des premières en simples cobayes? Une œuvre en perpétuel mouvement peut-elle faire fi des questions de qualité, voire du contrat de confiance entre un artiste et ses spectateurs?

Figure de proue du théâtre dit contemporain, Vincent Macaigne s'en défend avec ardeur. Passionné et sincère. «Ce que j'ai présenté hier (ndlr: jeudi) est une forme aboutie. Mes spectacles se révèlent avec le public. Par sa joie, ses rires, son agacement. Dans mon travail, j'ai cette envie très forte que les spectateurs soient des acteurs de mes pièces.» Bien entendu, l'artiste ne nie pas que chaque représentation sera différente. C'est là l'essence même des arts de la scène en prise avec le présent.

Prise de risque

Il n'empêche. La création de Je suis un pays a évolué jusqu'au dernier moment. La feuille de salle dévoile un autre texte que le synopsis diffusé sur le site. A Vidy comme dans les autres théâtres de création, ce cas de figure n'est pas exceptionnel. Comment convaincre, dès lors, le spectateur peu aguerri de débourser jusqu'à 45 francs pour assister à des spectacles qu'il n'a finalement pas tout à fait choisi? C'est là le contrat tacite qui nous lie à l'artiste. Qui implique, aussi, une prise de risque intrinsèque au désir d'assister à une pièce. Quand la déception est fréquente, elle peut toutefois devenir source d'incompréhension.

Mais les causes en sont multiples. Avec un monde du spectacle qui subit la récession et rogne autant sur les temps de répétition que sur le nombre de représentations (permettant de roder une production), la mise en danger des artistes est plus forte qu'auparavant. Sans parler des différences en termes de pratiques culturelles, comme le rappelle Vincent Baudriller: «En Angleterre, les critiques assistent aux spectacles une semaine après la première. Cela laisse le temps à l'œuvre de bien se déployer.»

«Cette œuvre s'adresse à tous»

Vincent Macaigne embraye. Chaque spectacle doit traverser son baptême du feu. «La vraie question, c'est ce que vous avez ressenti, ce que vous avez vécu.» Et l'accuser d'oublier son audience lorsqu'il est dans l'ébullition de sa création l'affecte. «Si quelqu'un me disait que je suis snob, je pourrais en pleurer. Au contraire, je veux prendre la main du spectateur. Il y a plein de portes d'entrée dans Je suis un pays, cette œuvre s'adresse à tout le monde.»

Pour Vincent Baudriller, Vincent Macaigne – l'un des artistes phares de sa programmation à Vidy – a justement ce pouvoir magnétique de déclencher une passion pour la scène. «Je suis persuadé qu'une personne qui vient pour la première fois à Vidy et qui assiste à Je suis un pays va se dire «Wow, c'est ça le théâtre?» Parce que cette pièce saisit d'une manière incroyable le monde dans lequel on vit. Et c'est cela qu'on essaie de partager: du théâtre d'aujourd'hui.»